Le 4 janvier 1936, l’Ouest-Éclair
UNE AVALANCHE D’EAU ENGLOUTIT TOUT UN QUARTIER DE SAINT-MAIXENT
La cote de 1904 est dépassée
NIORT, 3 janvier. De notre rédaction.
Certes, après les pluies continuelles et torrentielles dont nous venions d’être gratifiés depuis quelques jours, nous pouvions nous attendre à des inondations, mais pas de l’importance de celles qui se produisirent hier.
Ce fut, dès les premières heures de la matinée, une véritable avalanche qui envahit les bas quartiers de Saint-Maixent ; en moins d’une heure, la circulation fut interrompue sous le pont du chemin de fer ; elle le fut également rue des Marais, rue des Tanneries, et rue du Port de Lessons.
Rapidement le niveau atteignit 1 mètre 45. La cote de la fameuse crue de 1904 fut dépassée. De nombreuses familles furent bloquées dans leurs maisons.
Le colonel Hasseler, commandant l’École militaire de Saint-Maixent, et le lieutenant-colonel Besnier, vinrent se rendre compte du danger en compagnie de la Municipalité de Saint-Maixent qui mit la troupe à la disposition de celle-ci. Tandis que M. le commissaire de police assurait l’exécution des dispositions prises, les chariots militaires allaient porter secours aux inondés ; les chevaux avançaient d’ailleurs assez péniblement, ayant de l’eau jusqu’au poitrail.
Fait unique dans la mémoire des vieux Maixentais, la place Denfert était elle-même recouverte d’eau. Inutile de dire que les nombreux moulins de la région sont envahis ; les meuniers ont dû, pour la plupart, se réfugier dans leurs greniers.
A l’heure où nous téléphonons, on nous indique que deux personnes auraient disparu, mais nous donnons, pour le moment, cette information sous toutes réserves, M. Jouany, préfet des Deux-Sèvres, vient de partir sur les lieux.
Au Puys d’Enfer
L’inondation de Saint-Maixent est due, en partie, à la forte crue de la Sèvre, mais c’est surtout le Puy-d’Enfer qui a déversé le plus d’eau.
Cette pittoresque vallée, admirable reproduction en miniature d’une gorge pyrénéenne, est devenue un torrent impétueux qui charrie, dans un bruit assourdissant, jusqu’à d’énormes troncs d’arbres.
Les eaux du lac qui se trouve au-dessus franchissent une digue de 30 mètres de large et tombent d’une hauteur de 15 mètres, formant une superbe cascade. Des habitants nous ont affirmé que vers 8 h. 30, c’est une véritable nappe d’eau qui a descendu les coteaux voisins pendant quelques secondes.
A Niort
Prévenus par l’importance de la crue qui a lieu à Saint-Maixent, les Niortais ont aussitôt pris leurs dispositions ; des maisons ont été évacuées, des meubles du rez-de-chaussée ont été, dans beaucoup d’autres, montés au premier étage.
Déjà le pré Leroy est envahi ; le quai de la Regratterie est complètement recouvert ; la circulation est interrompue chemin de Saint-Martin ; l’écluse de Comporté est complètement noyée.
On attendait le maximum de la crue pour 21 heures.
Aux abords de la ville, dans des parties basses, les eaux forment d’immenses lacs ; la route de La Rochelle et la route de Saint-Jean sont coupées.
Dans le marais
Dès vendredi matin, la crue de la Sèvre mettait le Marais dans une situation inquiétante ; on signalait, en particulier, que le Marais de la Cagnote était recouvert par plus d’un mètre d’eau.
Tous les travaux des maraichins sont suspendus.
La route allant de Coulon à Irleau est coupée en plusieurs endroits entre La Sotterie et Passerelle. Les personnes devant emprunter cette voie de communication feront bien de prendre des précautions en conséquence.
Que sera-ce quand la crue de Saint-Maixent atteindra Coulon, La Sotterie et Irleau ?
A Bouin
Bouin, 3 janvier (de notre correspondant). — Plus nous avançons en saison, plus le temps devient mauvais. De forts orages se sont abattus sur Bouin hier et avant-hier, accompagnés de grosse pluie, de grêle et de fort vent. La foudre est tombée sur le clocher, n’occasionnant heureusement aucun accident de personnes.
On ne voit et on n’entend parler que d’inondations. Les marais sont couverts, des habitants sont obligés d’abandonner leurs maisons. Les communications se font par yole et beaucoup s’en servent dans l’intérieur de leurs habitations.
Ce mauvais temps cause un préjudice considérable aux cultivateurs.
Pas de victimes à St-Maixent
C’est par suite d’une erreur d’interprétation qu’on avait signalé la disparition de deux personnes à St-Maixent-l’Ecole. Plusieurs villages se trouvaient cernés par les eaux et les habitants étaient restés à l’intérieur. C’est pourquoi on n’avait aucune nouvelle d’eux.
Dans l’après-midi d’hier, le sauvetage a continué sous la direction de M. le Commissaire de police de St-Maixent. Au chariot de l’école militaire, on a dû substituer des canots pour opérer plus facilement. C’est ainsi que les habitants du village des Aubiers ont pu évacuer leurs maisons et être ramenés à Saint-Maixent.
En attendant, la pluie continue et le vent souffle du sud-ouest en tempête.
Une forte crue du Thouet à Parthenay
Parthenay, 3 décembre (de notre correspondant) :
Nous avons annoncé, dans nos colonnes que, jeudi matin, notre rivière « Le Thouet » avait débordé de son lit à la suite de pluies persistantes et en particulier de celle qui est tombée sans interruption au cours de la nuit de mercredi à jeudi.
Aussi, de nombreuses personnes de la ville se sont-elles rendues toute l’après-midi de jeudi, d’une part, vers le pont Saint-Jacques, où, depuis 24 heures, la rivière avait grossi de près de 80 centimètres ; d’autre part, sur la place du Château, pour juger du coup d’œil de la « Prée » complètement envahie par les eaux. De même, les curieux furent nombreux à Saint-Paul, où la rivière prenait l’aspect d’un torrent, en particulier au moment où elle recouvrait l’îlot planté de jeunes arbres, qui se trouve devant la laiterie Barribault. Enfin, on nous a signalé qu’au moulin de la Grève, il n’était plus possible d’utiliser la passerelle pour le moment, et que le chemin rejoignant le moulin menant à Parthenay-le-Vieux, était, lui aussi, en ce moment-ci impraticable.
Dans la soirée de jeudi, nous avons remarqué que la crue avait tendance à diminuer.
A Thouars, la route d’Orbé est coupée par les eaux
Thouars. 3 décembre (de notre correspondant) :
C’est une chose qui peut paraître à première vue insensée, car, dans ce village, situé à quelques kilomètres à l’est de Thouars, ne passe aucune rivière, aucun ruisseau.
Pourtant, des Thouarsais, qui, jeudi, durent aller en automobile à Orbé, ont été grandement étonnés de trouver la route baignant sur une grande longueur, sous 15 centimètres d’eau.
Les terres environnantes, saturées des eaux des dernières pluies, n’en peuvent plus recevoir, et le trop-plein se répand dans les cours, et jusque sur les routes.
Il serait grand’temps que les pluies cessent, car chacun s’inquiète grandement du lendemain.
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Le 5 janvier 1936, l’Ouest-Éclair
NIORT
LE QUARTIER DU PORT BLOQUÉ PAR LES EAUX
Les habitants sont ravitaillés par câbles La crue du 4 janvier a dépassé de 50 centimètres celle de 1904.
La crue continue et s’aggrave. Les pouvoirs publics ont fait des merveilles
Aussitôt que fut connue à Niort, la crue de Saint-Maixent, les préparatifs commencèrent en hâte ; car on sait que Niort subit généralement les crues douze heures après Saint-Maixent. D’ailleurs la Sèvre montait rapidement. Certains prétendent qu’elle montait de dix à quinze centimètres à l’heure. Dès l’après-midi de vendredi, le quai de la Regratterie était coupé ; coupés aussi la rue de Bessac et le chemin de St-Martin.
La veillée d’armes
Plus particulièrement menacé, le quartier du Port connut une véritable veillée d’armes. Après le dîner, nombreux étaient les curieux venus suivre les progrès de la crue aux vieux ponts. Les habitants s’affairaient. Les uns montaient leurs meubles du rez-de-chaussée au premier, d’autres évacuaient leurs maisons. Rue Baugier les plâtriers travaillaient dans la fièvre à élever devant chaque porte de petits murs de briques et à boucher le moindre trou. Dans chaque maison, on veillait à protéger tout ce qui pouvait être atteint par l’eau. Le cordonnier de la place des Ormeaux rangeait ses outils sur les étagères les plus hautes. Dans une humble maison, une femme avait réussi à installer son buffet sur une table. Plus loin, place du port, une autre en avait fait autant pour sa cuisinière.
Ceux qui disposaient de bateaux les amarraient solidement à leur porte et d’autres construisaient des passerelles.
La nuit apporta un peu de calme ; mais le bruit de l’inondation grossissant, empêcha beaucoup de gens de dormir et au matin le quartier du Port tout entier se trouva cerné par les eaux. Bien entendu il ne pouvait être question de passer par le quai de la Regratterie et même par suite d’un violent courant, pas une auto, pas un charriot, n’auraient pu s’y aventurer. L’eau montait si loin que M. Antoine Main, président du Tribunal civil, qui habite au coin du quai, était bloqué chez lui.
La rue de Bessac et la rue Baugier étaient transformées en torrent. Un courant d’une rare violence s’était amorcé entre la place des Ormeaux et la place du Port, s’engouffrant au passage dans les portes cochères ouvertes. Boulevard Main, l’eau arrivant par les canalisations souterraines dont elle avait crevé la voûte, jaillissait à plus d’un mètre de hauteur. La rue Gambetta était coupée par plus d’un mètre d’eau.
Les coquettes habitations construites sur les bords du canal, en direction de Saint-Martin étaient envahies.
Les secours sont merveilleusement organisés
Il faisait à peine jour que les secours s’organisaient. Disons tout de suite qu’ils l’ont été avec une rapidité merveilleuse et digne de tout éloge.
M. Martinet, architecte municipal, assisté de tout le personnel du service des travaux de la ville, s’était employé à trouver des camions et des charriots pour assurer le transbordement des ouvriers se rendant à leur travail. M. Frelicot, commissaire de police avec de nombreux agents, assurait le service d’ordre rue Baugier et rue de Fontenay, tandis que d’autres agents se trouvaient avec les gendarmes rue Gambetta.
Le commandant Fournier et les pompiers chaussés de bottes en caoutchouc portaient secours à tous les sinistrés qui les appelaient. Les bonnes volontés s’offraient également nombreuses et dévouées.
Le Préfet et le Maire sur les lieux
Sept heures et demie. Il fera beau aujourd’hui et la crue ne sera pas de longue durée. Il n’en faut pas plus pour que les Niortais, même les plus éprouvés, retrouvent leur bonne humeur.
Mais voici que les autorités viennent apporter le réconfort de leur présence. Conduits par M. Frelicot, commissaire de police, M. Jouany, préfet des Deux-Sèvres et M. le docteur Panou, maire de Niort, arrivent sur les vieux ponts. Un charriot les attend rue Baugier. Ils y montent en compagnie de M. Martinet et ils veulent bien admettre l’Ouest-Eclair en leur compagnie. En route les chevaux entrent dans l’eau. Ils en ont bientôt jusqu’au poitrail et l’eau affleure même la plate-forme du charriot, comme elle monte partout jusqu’aux fenêtres des maisons place du port. Il faut faire attention, car le courant est violent. Des camions, d’autres charriots passent lentement, chargés d’ouvriers et d’employés qui vont travailler.
On signale qu’une femme malade quelque part par-là ne peut recevoir de secours. On appelle le commandant Fournier pour qu’il aille chercher le docteur Lavigne, bloqué rue Gambetta.
Le ravitaillement
Dès 10 heures, il faut penser à l’importante question du ravitaillement, Un charriot chargé de pain et de viande passe dans les rues. On jette un câble aux habitants qui attendent aux fenêtres des étages. Puis à l’aide d’un panier on leur fait parvenir pain et victuailles. Quelques-uns ne peuvent recevoir aucun secours. Habitant au fond de cours traversées par des torrents, ils ne peuvent espérer la venue d’un bateau. M. le docteur Panou reste sur les lieux tandis que M. le Préfet part pour Saint-Maixent.
Mais maintenant un soleil radieux baigne ce spectacle de désolation.
On signale que, rue du Fort-Foucault, une octogénaire qui se trouvait malade, a du être transportée à l’hôpital à l’aide d’un charriot, ainsi qu’une jeune maman qui avait un bébé de quelques semaines.
A Niort, la crue d’hier, 4 janvier, a dépassé de 50 centimètres celle de 1904
La crue d’hier comptera tristement dans les annales niortaises. Elle a battu le record que détenait jusque-là la crue de 1904, avec 3 m. 55, puisqu’elle s’est élevée hier matin, au Vieux Pont, à 4 m. 05, soit 50 centimètres de plus.
Les dégâts, qu’on ne peut chiffrer exactement pour le moment, sont considérables. Outre ceux causés par l’eau, qui a pénétré dans tant de maisons, on signale des murs qui se sont écroulés, des maisons qui menacent de s’effondrer. Les rues sont ravinées ; la place du Port est en partie défoncée et des canalisations souterraines d’égouts devront être refaites à neuf, car de profondes excavations s’y sont creusées.
Trois importantes usines niortaises vont terriblement souffrir des suites de cette crue, car elles ont été complètement envahies par l’eau avant que les précautions eussent été prises. Ce sont les usines des trieurs Clert-Biscara, les usines Saint-Jean de M. Léchelle et les usines Boinot.
Aux usines Biscara, le bois flotte et ne sera de longtemps utilisable. L’eau arrive jusqu’aux moulins d’une quantité importante de trieurs qui étaient destinée à l’Exposition agricole de Paris. Hier-après midi, par suite d’une baisse de quinze centimètres environ, quelques ouvriers, chaussés de bottes de caoutchouc, ont pu réussir à charger une partie de ce matériel sur des camions.
Aux usines Saint-Jean, de nombreux bidons vides ont été emportés par le courant très violent, qui a mis hors d’usage des machines électriques installées au rez-de-chaussée.
Aux usines Boinot, la ganterie et une partie des chemiseries sont envahies par les eaux. Comme partout ailleurs, le travail est interrompu. Les matières premières ont subi des détériorations, ainsi que des machines.
On signale d’autre part qu’il est impossible de ravitailler Saint-Martin ni Belle-Ile, d’où pourtant on aurait fait savoir qu’on manquait de pain.
A Niort, le Service des Ponts-et-Chaussées continue à veiller
Hier après-midi, la garde mobile est venue prêter main-forte à la gendarmerie, à la police et aux pompiers qui, depuis le milieu de la nuit dernière, veillaient et travaillaient.
D’autre part, les services des Ponts et Chaussées, alertés, n’ont cessé de coopérer au sauvetage et ont prévu les accidents possibles. M. Jomier, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées monté dans un camion, a visité hier les principales rues envahies par l’eau.
A Mauzé-sur-le-Mignon
MAUZÉ, 4 janvier (de notre correspondant). — Le niveau du Mignon et de tous les cours d’eau de la région de Mauzé monte d’heure en heure. A Mauzé, le quartier de la Péroterie est envahi par le flot qui a obligé plusieurs habitants à évacuer leurs écuries. Près de la minoterie, le Mignon charrie en grondant un volume d’eau considérable, et l’on s’attend à voir envahies toutes les habitations du bord de l’eau. Le lavoir municipal est totalement isolé.
A Simoussais, plusieurs maisons sont inondées : chez M Larelle, chez M. Moinier, chez d’autres encore, le rez-de-chaussée des maisons est inhabitable, tandis, que, dans les écuries, le bétail est dans l’eau.
La ferme du Pont de l’Arceau a dû être évacuée : elle occupe, pour l’instant, le milieu d’un lac.
Le village de La Laigne a été envahi par les eaux du petit ruisseau qui le traverse. Dans la journée de vendredi, Mmes Planet et Godineau ont dû quitter leur domicile. Les rues sont transformées en rivières. L’eau arrive jusqu’au milieu de la route nationale, qui surplombe cependant de beaucoup le niveau du sol du village.
On signale d’autres inondations à Thorigny, à Ussolière, dans toutes les vallées des cours d’eau.
Dans le marais, le désastre est plus grave. Les digues qui, le long du Mignon, doivent retenir les eaux, se sont rompues en plusieurs endroits, et les fermes qu’elles protégeaient sont en danger. Les habitants de « La Hutte » ont dû déménager en pleine nuit ; aux Fontenelles, à l’Abotteau, en mainte « cabane », on a dû fuir également. Et la pluie tombe toujours, tandis que le vent fait rage. On n’avait pas vu semblable désastre depuis bien des années.
Le Marais Poitevin est transformé en immense nappe d’eau
On pourrait croire que la mer est revenue, comme au temps passés, aux portes de Niort, Tout le Marais poitevin est recouvert par les eaux, qui s’étendent ainsi sur plusieurs kilomètres de larges, de chaque côté de la Sèvre.
La route de Coulon est coupée à partir de Sevrau, où les cabanes des cénobites baignent, jusqu’à Magné, où les scieries sont complètement inondées. La route de Niort à Sansais est aussi coupée en plusieurs endroits. Il serait vain et imprudent d’essayer d’emprunter la route de Coulon à la Sotterie.
D’après les renseignements qui nous parviennent, des maisons maraichines sont menacées, particulièrement aux cabanes de Ballanger, où les propriétaires ont dû partir, et dans d’autres les occupants se sont réfugiés dans les greniers.
A Saint-Maixent-l’Ecole, le niveau a baissé légèrement
M. Jouany, préfet des Deux-Sèvres, s’est rendu ce matin à Saint-Maixent, où, en compagnie de M. Moinard, maire, il a visité les sinistrés.
Le niveau a légèrement baissé. Le Puy d’Enfer amène moins d’eau,; mais la Sèvre reste étale.
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Les inondations en France depuis le VIe siècle jusqu’à nos jours – Maurice Champion – 1864
Chapitre 33 – Inondations dans les bassins dépendants de l’Océan – Le Lay – La Sèvre-Niortaise.— L’Autise — La Vendée. — Situation ancienne des contrées que traversent ces rivières. — Submersion générale. — Travaux de desséchement des marais. — Rupture des digues des marais de Vix et Maillerais, en 1791. — Grande crue de la Sèvre, en 1859. — Observations de M. l’ingénieur en chef Deglaude, sur la régime de cette rivière. — La Charente. — La Tardouère. — La Boutonne. — Le Né. — Grandes crues de la Charente, en 1740, 1747 et 1783. — Détails contemporains. — Forte crue en 1801. — Inondation en 1859. — Ses effets à Angoulème, — Civray, — Aigre, — Savigné. — Submersion de la Rochefoucauld par la Tardouère.
La vaste étendu de marais que l’on voit sur les rives du Lay et de la Sèvre est le résultat de grands épanchements d’eau, dans les temps anciens, et tout le territoire compris dans la partie inférieure de ces cours d’eau est essentiellement aquatique ; comme en Flandre, on a dû y exécuter d’immenses travaux de dessèchement. « Des nivellements récents, écrivait en 1818, M. Cavoleau, secrétaire général du département de la Vendée (1), démontrent que le sol de nos marais est à peu près au même niveau que celui des marées moyennes du golfe de l’Aiguillon, et plus bas d’un mètre et demi ou deux mètres que le niveau des hautes marées des syzygies. Ainsi, pendant plusieurs siècles, la mer couvrait nos marais cinq ou six fois chaque nouvelle et pleine lune. Le lit du Lay, de la Sèvre-Niortaise et de leurs affluents, moins profond qu’il ne l’est aujourd’hui, était encore moins capable de contenir les eaux de ces rivières, qui s’étendaient sur toute cette immense surface qui n’était qu’un cloaque fangeux, foyer d’exhalaisons pestilentielles et incapable de se prêter à aucune espèce de culture. Quelques parties plus élevées se desséchaient naturellement pendant l’été, et la chaleur établissait une végétation vigoureuse sur cette vase molle et humide. Cette observation fit présumer sans doute qu’en facilitant, par des moyens artificiels, l’écoulement des eaux, le dessèchement annuel serait plus complet et durerait plus longtemps ; telle fut la cause des premières tentatives qui furent faites pour le dessèchement de nos marais. Nous manquons de monuments historiques pour fixer avec précision l’époque de ces premiers essais, mais il est probable que les deux premiers monuments relatifs à ce genre d’industrie sont le canal de Moriq et celui de Luçon. Avant que le canal de Luçon fût creusé, les eaux du Lay et de la Sèvre, grossies par celles de leurs affluents, se répandaient sur toute la plage marécageuse aussi loin qu’elles pouvaient s’étendre, et devaient souvent se confondre. Les levées du canal de Luçon leur opposèrent une barrière qu’elles ne purent plus franchir ; et le marais fut divisé en deux parties qui n’eurent plus ensemble aucun rapport. La partie occidentale forma le bassin de la Sèvre, et la partie occidentale celui du Lay. »
Dès le XIIIe siècle, des tentatives de dessèchements des terrains submergés furent faites au moyen de canaux, ou plutôt de rigoles, avec levées en terre s’opposant au débordement des rivières. Ce système eut ses avantages et ses inconvénients. « A une époque qui n’est pas fixée, dit un historien de Langon (2), on creusa un large et profond canal, auquel on ne donna qu’une levée, commençant au village de Langlée, continuant à travers les terres de Vouillé, et se rendant vers Marans. Il fut nommé bot (3) ou Achenaut de Langlée. Il parait que la levée de ce canal était assez forte pour s’opposer au débordement de la Vendée, qui n’en était pas fort éloignée, et que tous les marais situés à l’ouest furent assez desséchés pour former d’excellentes prairies. A la même époque, une levée construite pour aller à pied du Poiré à Véluire ne laissa d’autre issue aux eaux de la Vendée que la largeur du lit même de la rivière, sur laquelle on avait construit un pont. Trop resserrées dans ce canal étroit, et retenues par le bot de Langlée, elles refluèrent vers leur source, et inondèrent le faubourg des Loges de la ville de Fontenay, situé dans une position très basse, sur la rive gauche de la Vendée (4). Dans une année pluvieuse, l’inondation fut telle, que les habitants, pour sauver leurs maisons, résolurent d’aller la nuit rompre la levée du Poiré et celle du canal de Langlée. Les eaux trouvèrent une issue, et le faubourg des loges fut sauvé, mais les marais, que le bot de Langlée garantissait de l’inondation, retombèrent dans leur premier état, et les communes riveraines furent privées des fourrages et des pâturages qu’elles avaient coutume d’en tirer. Elles se plaignirent, et des commissaires, délégués par Philippe III, se transportèrent sur les lieux pour examiner le mal et en chercher le remède ».
Ce système de l’écoulement des eaux par des canaux se développa encore et arriva même à une certaine perfection, mais il ne tarda pas à tomber en décadence, faute d’entretien, sans doute, car on voit par des lettres patentes de François 1er, du 11 août 1526, « que tous les canaux étaient comblés, que les digues opposées aux invasions de la mer étaient rompues, que tout le pays était submergé et qu’on ne pouvait plus y voyager ni à pied, ni à cheval, ni en charrette. Le roi ordonna que le mal fût réparé ; mais il paraît que des ordres ne furent pas exécutés, ou que les troubles et l’anarchie de la dernière moitié du XVIe siècle détruisirent ce qui avait été fait, car au milieu du XVIe siècle, on fut obligé de consacrer, de nouveau, au dessèchement de ces marais des capitaux immenses. A cette époque, la partie orientale du bassin de la Sèvre n’avait pas encore participé à ce bienfait ; elle ne formait alors qu’un cloaque fangeux, couvert, pendant presque toute l’année, par les débordements de la Sèvre, de l’Autyse et de la Vendée, qui n’avaient d’autre issue à la mer que le lit même de la Sèvre, trop peu profond et gêné par des obstacles qui retardaient l’écoulement des eaux. Malgré l’édit d’Henri IV, du 8 avril 1599, sur les dessèchements, cette grande œuvre d’utilité publique ne commença vraiment à se manifester qu’en 1643, où une compagnie réalisa le premier dessèchement régulier et complet dans la partie occidentale du bassin de la Sèvre, entre la Vendée et le canal de Luçon. A partir de ce moment, l’impulsion fut donnée ; le court espace de quinze années fut suffisant pour dessécher tous les marais de cette contrée, pour tirer du sein des eaux et couvrir de riches productions, une vaste étendue de terre, que la nature semblait avoir vouée à une éternelle stérilité. Mais ces conquêtes de l’industrie sur un élément destructeur ne se bornèrent pas à la partie occidentale du bassin de la Sèvre. L’enthousiasme des dessèchements se communiqua aux propriétaires de la partie orientale, au nord et au midi de la rivière, qui opérèrent les mêmes prodiges, en surmontant des difficultés plus grandes encore (5).
« Pour garantir les marais desséchés de l’invasion des eaux de la Sèvre et de ses affluents, on les avait entourés de fortes digues. A peine furent-elles construites, que l’on s’aperçut qu’elles resserraient beaucoup trop le lit de la Sèvre, de sorte que les eaux affluaient dans la partie inférieure avec une violence qui menaçait d’engloutir tout ce qui se trouvait sur leur passage. La ville de Marans fut particulièrement menacée d’une entière destruction ; les habitants effrayés communiquèrent leurs alarmes à tous ceux de leurs voisins que ce torrent pouvait atteindre ; et, dès l’année 1662, ils tinrent une assemblée dans laquelle on chercha le remède au mal que l’on craignait. Les intéressés aux dessèchements des deux rives de la Sèvre sondèrent le mal dont ils étaient eux-mêmes les auteurs. Ils s’aperçurent avec effroi que l’élément fougueux dont ils avaient espéré contenir la violence, pouvait engloutir leurs digues dans une heure, et avec elles, les sommes considérables qu’ils avaient dépensées, pour tirer leurs propriétés du sein des eaux. Ils se réunir et ne trouvèrent pas d’autre moyen de prévenir le danger qui les menaçait que de creuser un nouveau canal pour dériver et conduire à la mer, sans passer par Marans, une partie des eaux de la Sèvre et de des affluents. Ce canal fut creusé en 1664, entre la Sèvre et le marais de Vix ; on le nomme contre-bot de Vix, parce qu’il fut creusé au pied et en dehors du bot ou levée du canal de Vix, qu’il suit parallèlement dans tout son développement. Depuis qu’il est creusé, non seulement les digues des marais desséchés sont moins menacées, mais la grande étendue de marais qui reste encore à dessécher dans cette partie du bassin, est moins inondée et est devenue plus productive. »
Cependant des ruptures se manifestèrent plusieurs fois dans les digues, comme, par exemple, au mois de janvier 1791, où les marais de Vix et Maillezais furent submergés à la suite d’un accident de ce genre. Il résulte du procès-verbal dressé pour constater les pertes, évaluées à 444,475 livres, « que les eaux considérables dont étaient chargés les marais mouillés qui confrontent aux marais desséchés, agités par un très grand vent, rompirent, la nuit du 19 au 20 janvier, la digue appelée de l’Ile Delle, dans la largeur de 25 toises, et que, malgré l’activité qui fut mise en usage pour la réparer promptement, les marais furent en peu de temps couverts d’environ deux pieds d’eau ; que l’écoulement de ces eaux ne s’opéra que très lentement, et pas avant la fin d’avril (6).
Aucun renseignement authentique n’existe sur les grandes crues de la Sèvre antérieurement à 1859. Celle qui eut lieu cette année, au mois de novembre, est considérée dans le pays, comme la plus haute connue ; elle s’éleva à Niort, à 1 m. 52 au-dessus du niveau réglementaire des eaux, et à Marans, ne dépassa ce niveau que de 1 m. 05 seulement. Son débit a été estimé à 200 mc. Le 1er novembre à Niort, la Sèvre, qui allait toujours grossissant depuis quelques jours, submergea les quais de la Regratterie, la petite place des Ormeaux et une partie de la grande rue du Port. Les magasins étaient envahis, et les eaux pénétraient dans les habitations. Sevreau, Magné, Coulon, Saint-Liguaire et les villages du haut de la Sèvre, furent inondés. On écrivait de Napoléon-Vendée (7) : « Les pluies diluviennes qui sont tombées la semaine dernière et au commencement de celle-ci, ont considérablement grossi les différents cours d’eau de la Vendée. Dimanche, vers neuf heure du matin, le ruisseau l’Yon, qui est presque toujours sans eau et peut à peine faire aller un moulin près de Napoléon, a grossi subitement et s’est élevé de plusieurs mètres. Les habitations riveraines et les prairies ont été inondées, et, pour donner une issue aux eaux, il a fallu ouvrir une tranchée aux boulevards du sud de la ville. L’inondation s’est également fait sentir dans différentes autres localités du département de la Vendée. Dampierre, Chantonnay, Mareuil, Talmont ont été pendant deux ou trois jours envahis par les eaux. »
Quelques explications suffiront pour faire comprendre comment il se fait, dit M. l’ingénieur en chef Deglaude (8), chargé du service spécial de la Sèvre, qu’on ait porté si peu d’attention jusque-là aux crues de cette rivière. La Sèvre, à partir de Niort, est canalisée au moyen de barrages éclusés ; elle coule lentement dans un lit très étroit, de 20 à 30 mètres de largeur, à travers une vallée extrêmement plate, d’une margeur moyenne d’environ 4,000 mètres. La pente totale des 54 kilomètres de son parcours jusqu’à Marans est de 7,50 mètres. Cette pente est divisée en 7 biefs, dont les chutes varient entre 1,50 mètre et 0,40 mètre. La pente par kilomètres qui, à Niort, est de 1,34 mètre, n’est plus, sur les 20 derniers kilomètres, de Bazoin à Marans, que de 0,03 mètre. Au-delà de Marans jusqu’à la mer, la navigation de la Sèvre est maritime. Sur ces derniers 13 kilomètres de son cours, sa pente se relève brusquement à 0,22 mètre par kilomètre, et les inondations ne sont plus à craindre. Il suffit d’une crue de 27 mc par seconde pour occasionner l’épanchement des eaux sur leurs rives, en amont de Marans. Dès que l’eau déborde, elle s’étale promptement sur toute la largeur de la vallée, d’où elle se retire ensuite très lentement à travers les milles canaux du réseau de dessèchement de cette vallée, autrefois très marécageuse et aujourd’hui d’une grande fertilité. Les propriétaires des 16,000 hectares dudit bassin submersible, dont la valeur a augmenté d’au moins 30 millions depuis 1835, sont loin de redouter les grandes crues, à moins qu’elles ne surviennent, par extraordinaire, pendant que les récoltes sont sur pied. ils désirent, au contraire, les longues inondations d’hiver qui sont fertilisantes, et qu’ils cherchent à prolonger ; mais en revanche, ils redoutent extrêmement les moindres petites crues du printemps, parce que la plus petite crue submerge toute la vallée, tout aussi bien que la plus grande crue extraordinaire, et que la submersion d’un territoire bien cultivé est à ce moment véritablement désastreuse. Il suffit d’une simple petite crue, ayant un débit supérieur à 27 mc, pour détruire la totalité des récoltes de cette vaste superficie.
(1). Description du département de la Vendée. Nantes, 1818, in-4, p. 28.
(2). Cité par M. Cavoleau, p. 30
(3). Dans le pays, le mot Bot est synonyme de levée ou digue ; contre-bot signifie un canal creusé au pied et le long d’une digue.
(4). Ch. Estienne disait en 1525, en parlant de Fontenay-le-Comte : « Au pied des murailles de cette ville passe Vendée, petite rivière, laquelle est aucunes fois si grande et impétueuse, qu’elle couvre tout le bas Fontenay et aussi les prairies à l’entour. » (Le Guide des chemins de France, page 204).
(5). Cavoleau, ouvrage cité, page 32 (Topographie. Bassin de la Sèvre). Voir 1e partie.
(6). voir supplique adressée aux administrateurs du district de Fontenay, par les intéressés au dessèchement des marais de Vix et Maillezais. Deuxième partie. Documents, page CXLIV, pièce 322.
(7). Revue de l’Ouest du 5 novembre 1859.
(8). Lettre particulière datée de Niort, le 5 mars 1863.



L’étang du Puy-d’Enfer dont les eaux se sont déversées sur Saint Maixent
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Le 6 janvier 1936 – L’Ouest-Éclair
NIORT – APRÈS LA CRUE DE LA SÈVRE
Dans le quartier du port, la Sèvre avait baissé hier matin de un mètre au moins et l’eau s’était retirée de nombreuses rues : rue Baugier, rue de Bessac, place du Port, boulevard du Main, étaient à sec, mais dans quel état !
Ici les pavés avaient été arrachés et emportés par le courant et se creusaient des trous profonds ; toutes les chaussées étaient ravinées ; le boulevard du Main interdit à la circulation de peur d’accident car la voûte d’un canal souterrain avait été crevée en plusieurs endroits.
Enfin, délivrés, les habitants contemplaient, la mort dans l’âme, les dégâts causés à leurs maisons et à leurs meubles.
Chez M. Pelet, peintre, rue Baugier, l’eau s’est élevée à 75 centimètres, détériorant les meubles, baignant les rouleaux de papier peint, les pots de peinture, tout le matériel.
Place du Port, le plancher d’une chambre a été soulevé par l’eau. A côté, une maison en contrebas a encore un mètre d’eau. Le malheureux locataire gémit devant sa porte : « Je ne peux même pas entrer chez moi pour sauver quelque chose et dire que les pompiers sont partis ce matin à l’exercice, au son des tambours et des clairons ; ils feraient mieux de venir pomper l’eau qu’il y a chez moi ».
Partout règne la désolation ; partout la même consternation attristé les physionomies.
Le quartier du port est complètement dévasté et impossible de décrire chaque cas particulier mais pour juger de l’ampleur du sinistre un coup d’œil suffit sur ces rues défoncées, sur ces gens qui s’affairent, sur ces meubles détériorés s’entassant devant les portes.
A cette vue, le cœur se serre ; que vont donc devenir tous ces braves gens qui déjà, pour beaucoup, sont douloureusement touchés par la crise ?
Les industries elles-mêmes sont cruellement atteintes ; outre les usines Biscara, Lechelle et Boinot, dont nous avons parlé hier, il faut citer la scierie Braugier dans laquelle le courant s’est engouffré avec une telle violence que les portes ont été arrachées, le bois jeté pêle-mêle, les scies et machines mises hors d’usage ; une auto a baigné pendant 24 heures ; les stocks de bois seront inutilisables ; un pont menace ruine, soulevé par la crue, il s’est retrouvé, à la décrue, miraculeusement en équilibre.
Les dégâts Les dégâts s’élèvent à plus de 50.000 francs.
Chez M. Lefébure, des milliers et des milliers de francs de marchandises d’épicerie ont été dépréciées ou complètement anéanties.
A Bessac
Il a fallu attendre la fin de la crue pour pouvoir atteindre les dernières maisons du quartier de Bessac ; celles-ci, voisines de Fleuriau, sont bâties sur la rive de la Sèvre, en amont de la ville.
Au cours de la randonnée que nous avons faite dans la matinée d’hier, nous avons pu juger de l’importance des dégâts causés dans cette partie de la ville. Si les habitants de la rue Baugier et rue Bessac étaient désormais hors de danger, les ménagères n’en étaient cependant pas moins affairées ; armées de balais, de pelles, elles faisaient le nettoyage consciencieux de leurs demeures à l’intérieur desquelles l’eau avait amassé du limon et de la saleté de toute sorte.
Tout un côté de la rue Bessac était encore inondé ; les maisons n’avaient accès que par un pont de planches. Enfin place du Moulin-de-Bessac, le spectacle était lamentable, des murs écroulés, des débris de bois, de ferrailles ; une vraie couche de boue de laquelle se dégageait une odeur fétide atteste la violence de la crue.
Bien que ce soit dimanche, il y a grande animation dans ce quartier retiré et les voix de tous les travailleurs se mêlent au grondement sourd des eaux qui semblent encore mécontentes et inassouvies ; c’est qu’en effet, dans un espace très réduit, il se trouve dans ce quartier qui porte le nom de Moulin de Blossac, une blanchisserie, une crinerie, fabrique de semelles de sabots.
6.000 francs de dégâts à la Blanchisserie Modèle
La cour de la blanchisserie modèle n’est plus qu’un cloaque. Avertis d’une crue qu’on prévoyait de 40 centimètres seulement, les propriétaires n’avaient pris presque aucune précaution ; aussi les dégâts sont-ils considérables : les bâtiments abritant les produits chimiques, savon, javel, le garage et les bureaux directement adossés à la rivière ont été entièrement inondés ; un mur même n’ayant pu résister à la poussée des eaux s’est écroulé et a été détruit.
Le combustible a été emporté et une voiture automobile a été submergée ; trois moteurs électriques ont été mis hors d’usage ; seul le linge a pu être sauvé à temps dans la nuit.
Un sabotier s’accrochait désespérément à ses billes de bois
Dans la même cour, au milieu, de laquelle subsiste seule désormais une volière habitée par quelques pigeons, se trouve également l’atelier de M. Bagot, fabricant de semelles de sabots. Celui-ci venait justement de recevoir un wagon de billes de bois destinées à être travaillées. Le sabotier les avait rangées dans sa cour, à proximité de son atelier qui abritait tout son outillage, et un nombre considérable de semelles de sabots qu’il devait livrer sous peu.
M. Bagot ne put rien sauver, et il assista impuissant à la débâcle. Ce fut en vain qu’il s’accrocha à chacune des billes de bois qui, une après l’autre, partaient à la dérive. Toutes ses machines ont été détériorées.
« Comme c’est malheureux, nous confiait-il, hier matin, d’avoir travaillé comme je l’ai fait et de voir ainsi tout son travail et tout son gain emporté par l’eau. »
Les Établissements Sene ont également souffert
Enfin, la troisième usine est celle des Établissements Sene ; c’est une crinerie, où l’on travaille la soie de porc. Tout comme leurs voisins, les propriétaires, qui étaient loin de s’attendre à semblable catastrophe, n’avaient pas pris de précautions. Hier matin, les dégâts apparurent considérables. Les machines ont beaucoup souffert Quantité de machines ont été détruites.
Les maisons particulières n’ont point été épargnées
Toutes les maisons riveraines de la rue de Bessac ont évidemment été inondées. Il n’est pas un rez-de-chaussée qui n’ait été submergé, mais, malgré tout, hier matin, tout le monde acceptait de bon cœur les propos gais et comiques, faisant contre mauvaise fortune bonne figure : témoins celui-ci qui annonçait à un ami qu’il venait de laver son meuble et sa vaisselle à coups de balai ; celui-là, qu’il venait de retrouver son carnet de mariage et son livret militaire sous le foyer de sa cuisine, cet autre enfin qui se lamentait de ne plus voir son chat, disparu depuis quarante-huit heures.
Mais les plus chanceux furent bien ceux qui, pour leur déjeuner, réussirent à capturer une bonne friture de gardons. En effet, certains ont eu le bonheur de découvrir dans les trous des murs des gardons surpris par la baisse des eaux et qui étaient restés là, croyant la cachette sûre.
Du boulevard Main à Saint-Martin
Nous voici maintenant en aval de Niort, boulevard Main. Les dégâts dépassent tout ce qu’on peut supposer. Au Bas-Sablonnier, des murs sont démolis sur de grandes longueurs. Les chemins de halage qui conduisent à Saint-Martin ressemblent à un lit de de torrent desséché. Sur la rive gauche, le chemin est coupé de profondes rigoles, par lesquelles s’écoule en bouillonnant l’eau qui a envahi les cours et les jardins, ainsi que les maisons. Là encore, des murs ont été couchés, des grilles rompues et arrachées. Les installations nautiques de l’A.S.N. n’existent plus ; sur la rive droite, l’eau se retire lentement ; on pêche dans les jardins, où les poissons foisonnent.
Impossible d’aller jusqu’à la Belle-Etoile à pieds. Les autos elles-mêmes ne peuvent plus pousser jusqu’à St-Martin ; les chemins environnants sont recouverts de plus de 50 centimètres d’eau.
Dans le marais
Le maximum de la crue a atteint désormais le marais poitevin. Les nouvelles manquent totalement ; toutes les communications sont coupées avec la région la plus menacée. Il est même impossible, par suite de la violence du courant, d’y accéder en bateau.
Les services publics au secours des sinistrés
Dès l’aube, hier matin, M. Jouany, préfet des Deux-Sèvres, et M. le docteur Panou, retournaient sur les lieux pour se rendre compte de l’immensité du sinistre et tâcher, par leurs encouragements, de réconforter cette laborieuse population.
Nous croyons savoir qu’une demande de subvention va être adressée pour soulager tant d’infortunes. Mais comment évaluer tous les dégâts qui sont causés ?
De leur côté, les services de travaux de la Ville, malgré une nuit et une journée de dur labeur, ont repris hier matin pelles et camions. Sous la direction de M Martinet, ils ont porté secours aux sinistrés qui en avaient le plus besoin. Et ils ont commencé en hâte la réfection des chaussées. Des barrages ont été établis aux endroits les plus dangereux. Dans la journée d’hier, bien que le temps fût encore menaçant, une foule de Niortais vint défiler place du Port et tout le long des terrains immergés.
Potins de la Brèche
Les fiacres d’antan avaient pourtant leur utilité et leur charme. En 1904, lors de la terrible crue de la Sèvre, les fiacres d’alors prenaient des voyageurs et moyennant quatre sous leur faisaient traverser la place du Port, entièrement recouverte d’eau.
Il fut un moment où, samedi dernier, les taxis auraient été bien en peine d’en faire autant.
Il est des gens qui réellement se passionnèrent pour les inondations de samedi dernier. Une personne demeurant dans le centre de la ville est allée douze fois de chez elle aux Ponts-Main, pour se rendre compte où en était la crue.
Des paris même furent faits à l’occasion de la crue. Ainsi un très sympathique niortais annonçait, dans l’après-midi de samedi, à tous ses clients, qu’au cours de sa promenade sur les rives inondées de la Sèvre, il était allé de la rue Gambetta à la place du Port sans se mouiller les pieds. Ce fait paraissait paradoxal car tout le monde savait très bien que la place du Port et les jardins baignaient abondamment.
Mais un pari s’engagea, dont l’enjeu très intéressant était de 600 frs. La discussion se poursuivit, et ma foi, devant l’assurance de plus en plus grande du promeneur le pari ne tint pas.
Et dans la soirée, on pouvait encore entendre raconter l’exploit que personne évidemment ne voulait croire.
Même dans les moments les plus tragiques et les plus tristes, on cherche à se distraire afin que passent plus vite les mauvaises minutes. Ainsi bien des personnes dont le pied des maisons se trouvaient dans l’eau, étaient-elles tranquillement à leur fenêtre en train de pêcher.
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Le 7 janvier 1936 – L’Ouest-Éclair
NIORT – LENDEMAIN D’INONDATIONS
Hier matin dans le marais en aval de la Sotterie le niveau de la Sèvre s’élevait toujours. Dans notre marais la crue atteint une hauteur que de mémoire de maraîchins on n’avait jamais vu. Sur les deux rives de la Sèvre les villages de Prépelot, des Avis, de la Sotterie, de Baîlanger, de la Sèvre et des cabanes de la Sèvre sont complètement isolés. Le ravitaillement est très difficile. On nous signale même des fermes isolées qui n’ont pas été ravitaillées depuis jeudi.
Hier matin 6 janvier nous avons noté des hauteurs d’eau atteignant 1 m. 50 et 1 m. 80 sur les marais du Vanneau.
Les foins engrangés ont particulièrement eu à souffrir ; les dégâts sont considérables. Pour l’instant on ne peut les estimer. De nombreux maraîchers ont dû déménager en hâte leurs animaux et le déménagement se continuait encore dans la journée d’hier. A l’heure où nous télégraphions la décrue s’annonce à Coulon et même à la Sotterie ; mais l’eau continue de monter dans les villages des cabanes de la Sèvre aux confins des départements des Deux-Sèvres et de la Vendée. De toutes parts l’eau a envahi les maisons et les écuries. On a dû mettre des cales sous les meubles et monter dans les greniers tout ce qui était plus facilement transportable. La consternation règne dans toute la vallée de la Sèvre et pour ajouter encore à cette catastrophe la pluie s’est remise à tomber dans la nuit de dimanche à lundi.
A Frontenay-Rohan-Rohan
Le bourg de Frontenay-Rohan-Rohan qui cependant n’est traversé par aucune rivière a beaucoup souffert lui aussi des inondations. La plupart des habitants ont été contraints de puiser l’eau de leurs caves et même de leurs rez-de-chaussée à l’aide de pompes.
M. Didier, pâtissier, ne pouvait pas accéder à son four, aussi dut-il renoncer à faire cuire ses gâteaux. La ferme de la Clielle, sur la route de St-Symphorien, est toujours entourée d’eau, si bien qu’il est toujours impossible d’y aller autrement qu’en charrette. Les propriétaires des fermes de la Grenouille ont été obligés de déménager et d’aller se réfugier au 1er étage.
A Sansaîs Le dessèchement du marais communal
Le Conseil municipal de Sansais, après de très légères modifications, a adopté à l’unanimité un projet de dessèchement du marais communal de la Garette. D’après ce plan de nouveaux chemins ont été tracés et une orientation différente a été donnée aux Taches, ce qui permettra à chaque parcelle d’être desservie par un chemin et un fossé. Le prix total de ce projet voisine 25.000 francs. Afin de permettre de commencer les travaux la récolte de cette année sera vendue aux enchères.
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Le 8 janvier 1936 – L’Ouest-Éclair
LES INONDATIONS DANS LES DEUX-SÈVRES
NIORT (de notre rédaction). — Les dégâts causés par la crue dans le marais se chiffrent par plusieurs millions. Dans les villages de la Sèvre et des cabanes de la Sèvre la crue a atteint son maximum. Dans la soirée de lundi les deux tiers des maisons ont été abandonnées. L’évacuation des bêtes a été difficile. Des personnes ont passé des journées entières dans l’eau jusqu’au ventre. On doit à tous ces héros obscurs et anonymes de ne déplorer aujourd’hui aucun accident.
On signale un cas de congestion, M. Alphonse Coursault de Ballanger et une maison effondrée au village des Cabannes. Les maraichins et le bétail ont été recueillis par les habitants d’Irleau Arcais et Le Mazeau.
Aujourd’hui les hameaux des Cabanes de la Sèvre offrent un spectacle désolant. Les portes ouvertes des maisons abandonnées laissent voir à l’intérieur les meubles qui ont été soulevés au moyen de fagots. En certains endroits l’eau sort par les fenêtres. Ce sont surtout les meubles et les fourrages engrangés qui ont eu à souffrir. Nous espérons bien que la détresse des maraichins sera prise en considération par les pouvoirs publics et qu’on leur accordera les secours désirés.
Des villages submergés
MANCOUTANT. — Depuis quelques jours le niveau de la Sèvre Nantaise s’est considérablement élevé. La toiture du lavoir municipal disparait presque sous l’inondation. Les villages avoisinants en particulier la Morinière et la Sablière sont complètement submergés.
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Le 8 janvier 1936 – L’Ouest-Éclair
DEPUIS TROIS SIÈCLES NIORT A ÉTÉ INONDÉE SEPT FOIS
Les habitants de certains quartiers de la ville viennent de vivre des heures particulièrement émouvantes. La Sèvre, espérons-le, va bientôt rentrer dans son lit, et, tout comme en 1747, 1859, 1874, 1904, 1908 et 1922, les Niortais n’auront plus bientôt que le triste souvenir de ces lamentables journées des vendredi, samedi et dimanche, 3, 4 et 5 janvier, qui resteront, certes, dans leur vie, comme un spectacle inoubliable.
Une dame du quartier du Port racontait, lundi dernier, que son piano en était à son troisième bain. C’est qu en effet, la plupart des Niortais actuels ont connu maintenant trois inondations : 1904, 1932 et 1936.
Mais, si l’on remonte beaucoup plus haut dans le passé, on découvre, dés le XVIIIe siècle, une crue très importante celle de 1747, qui emporta les fragiles ponts de bois établis alors à l’emplacement des ponts actuels.
On raconte, d’autre part, que les eaux de la source de Bouillounouse ayant envahi le pied du rempart de la ville, pour écouler cet amas de liquide dans la Sèvre, par le canal du Merdusson, les Pouvoirs Publics firent ouvrir, au droit de l’actuelle rue Richard une brèche dans le mur de la ville.
Il fallut attendre le 1er novembre 1859, pour assister à une nouvelle crue énorme, dont la hauteur a été longtemps indiquée par un trait et une date, au Moulin de Bessac, sur le mur, en amont du moulin. Tout le quartier du Port avait été inondé, aussi les sinistrés s’étaient-ils fortement émus à la pensée qu’ils étaient victimes du mauvais état de la rivière, et pourtant aucun travail ne fut fait, à cette époque, pour atténuer l’effet désastreux des crues.
La Regratterie, les rues Baugier et de Bessac durent baigner à nouveau, en l’année 1874, pour que des travaux fussent imposés aux propriétaires des moulins postérieurs à 1674. Mais, ajoutons que l’amélioration apportée alors au régime de la Sèvre fut néanmoins assez légère, d’ailleurs les riverains s’en aperçurent trente années plus tard, en février 1904.
Il y a encore huit jours, la fameuse crue de 1904 restait, dans l’histoire mortaise, comme la plus forte et la plus épouvantable. N’avait-elle pas, en effet, atteint, à l’étiage des Vieux-Ponts, 3 m. 55 ? Ceux qui ont assisté aux inondations de la semaine dernière se feront une juste idée de ce que furent celles du commencement du siècle. Mais les secours étaient alors assurés par les soldats du 7e hussards, et ce furent les fourgons du régiment qui firent la besogne effectuée, cette année, par les charrettes et camions. Et d’autre part, comme nous le soulignions, il y a quelques jours, les fiacres étaient là, qui moyennant quatre sous, faisaient faire aux curieux la traversée de la place du Port inondée.
Deux ans plus tard, exactement, la Sèvre fit à nouveau des siennes, et les Niortais revécurent une seconde fois les heures de février 1904
LA DERNIÈRE CRUE REMONTAIT A 1922
A la suite de pluies de plusieurs jours, le vendredi 29 décembre 1922, à 9 heures du soir, la rivière atteignait, dans certains endroits, le niveau redoutable de février 1904. Toute la nuit se passa dans l’angoisse, car, jusqu’à 2 heures du matin, la crue ne cessa de grossir, pour devenir sensiblement plus forte que les précédentes. Cette fois encore, les habitants des bas quartiers furent bien éprouvés, et, sans le concours des artilleurs du 49e, en garnison à Niort, et ceux de la police et des gendarmes, leur sort eût été des plus malheureux.
Enfin, il y a cinq jours, les « éternels rescapés » viennent de vivre le dernier épisode, combien épouvantable, de cette trop longue série de catastrophes. La Sèvre, loin de s’assagir, reste toujours indomptable. Elle continue d’inquiéter les riverains qui voudraient bien, en ces sinistres moments de crue, habiter loin de ses bords qui, cependant, restent, malgré tout, pour eux, pendant la belle saison, l’oasis de fertilité et de bien être.
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ÉPHÉMÉRIDES HISTORIQUES DE LA VILLE DE NIORT
Publiées en 1867 et 1868 dans le Mémorial des Deux-Sèvres, réimprimées avec une table par Émile Breuillac.
10 mars 1660
1660. Les ponts de Niort ont été ruinés par l’inondation du 12 mars 1657. Le conseil d’Etat a rendu le 14 janvier 1660 un arrêt ordonnant qu’ils seront reconstruits au prix (te seize mille livres, dont l’élection de Chastellerault paiera douze cents livres, celle de Poitiers quatre mille, celle de Saint-Maixent seize cents, celle de Niort deux mille quatre cents, celle de Fontenay-le-Comte trois mille deux cents, celle de Thouars deux mille quatre cents, enfin celle de Mauléon douze cents livres.
Le roi rend à son tour exécutoire l’arrêt du conseil d’État par des lettres royaux, dans lesquelles il constate que la démolition des ponts de Niort a fait un préjudice notable au commerce de la Saintonge, du Limouzin et du Poitou ; que la ville de Niort a contribué jadis à la réfection des ponts de Saumur, de Châtellerault, d’Houlines et de Puybermier, qu’il est juste qu’on lui vienne en aide ; il ordonne que la somme de seize mille livres sera levée sur les différentes éjections, plus une somme de quatre cents livres pour les frais d’expédition et de sceau réduits et modérés.
22 décembre 1748
1748. Une grande inondation ayant dévasté la ville de Niort vers la fin de 1747 l’ingénieur a préparé un devis des réparations nécessaires, et devant être exécutées en 1748. Ce devis s’élève à une somme de trois cent quarante et un mille cinq cents livres. Il comprend la réparation du pont sur la Sèvre communiquant avec le faubourg du Port, l’ouverture d’une nouvelle porte dans les murs, la construction d’un aqueduc pour l’écoulement des eaux de Bouitiounouse, le dessèchement des rues et le recurement du canal de la navigation de la ville. La porte qu’il était, question d’ouvrir était la porte de la Brèche, la quatrième de la ville. Elle est faite, dit le projet, pour la commodité de la route qui traverse la ville, venant de Paris, et sortant par la Porte Saint-Jean. Ce projet parle aussi de faire le champ de foire dans le terrain actuel, devant les murs. Le nom de l’ingénieur chargé des devis était Bonnichon : l’adjudicataire des travaux fut un nommé Jean Rambeaux, entrepreneur de Poitiers. Celui-ci eut plus tard un procès à soutenir avec la ville, particulièrement pour l’établissement qu’il avait fait d’un pont provisoire pendant les constructions. Ce procès, grâce à l’intervention de l’intendant de Poitiers, se termina le 28 janvier 1760, par une transaction entre la commune et l’entrepreneur.
Source : Mémoires de la Société de statistique du département des Deux-Sèvres, 3e série, tome 1er, 1884, pages 247-391
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LE CANAL DU MERDUSSON
Par un arrêté du 12 juillet 1867, le maire de Niort donna le nom de rue des Accacias (sic) à la petite rue qui commence à la rue Saint-Jean et se termine en potence par un passage étroit sur la rue du Rabot. Cette ruelle s’appelait antérieurement rue du Merdusson. On la nommait ainsi dans le langage naïf de nos pères, dit M. de Sainte-Hermine (1), parce qu’à son extrémité se trouve un égout qui communique au grand canal de la ville et sert de réceptacle à toute espèce d’immondices.
On substituait au nom du Merdusson celui des Acacias à cause de deux arbres plantés dans la rue pour éviter que les passants ne tombassent dans le canal ouvert en cet endroit. Ainsi disparaissait le nom, dernier vestige, d’un canal qui, après avoir rendu de grands services à nos ancêtres, avait été pour eux la cause de nombreux maux.
Avant que Niort devint une ville par la réunion des deux collines de Saint-André et de Notre-Dame, les terrains situés entre ces deux hauteurs étalent une espèce de marais traversé par les eaux descendant des coteaux voisins. En hiver, après des pluies abondantes, les eaux formaient un véritable ruisseau émergeant au bas du rocher sur lequel l’avenue de Paris est aujourd’hui établie. L’embouchure de ce cours d’eau se trouvait sur le quai actuel de la préfecture, à l’endroit à peu près où l’on voit un lavoir abandonné depuis quelques années. Une source sort du lavoir. Nous croyons pouvoir affirmer, sans crainte d’erreur, qu’elle est résultat des infiltrations des eaux qui autrefois trouvaient là un débouché complet et suffisant. Toutefois l’ancien cours de la rivière demande quelques explications.
Le quartier de la rue du Pont est un terrain remanié ; le coteau Saint-André, (ainsi que très judicieusement M. Apollin Briquet l’observe, Soc. de Stat. Mém. t. VIII, 1re série), était autrefois plus abrupt. Le cours du moulin du château n’était pas encore creusé, l’îlot de la fonderie se rattachait à l’est à la terre ferme. La rivière, déjà divisée par la bande de terre où sont aujourd’hui les bains Clert, tournait à droite avec grand élargissement de son lit, cernait les îlots de l’usine Boulard et Simon, plus loin du fort Foucault et ramenait son bras principal vers la gauche, au quai actuel de la préfecture. L’état ancien se rétablirait à l’instant par la suppression du pavé entre le pont et la fonderie, du barrage sous l’arche du pont, près de l’entrée de l’usine Boulard et de celui qui sépare les bains Juin de la maison de Vidiani mouleur. Cet élargissement de la rivière explique le Novioretum puis Noiordum ou nouveau gué, lequel d’après M. Fillon a donné son nom à la ville. C’est le seul endroit où l’eau ne soit pas trop profonde pour établir ce gué, surtout en abaissant le niveau de la nappe, vu la non existence des barrages de la Roussille et Comporté. Le premier chemin fait sur le coteau Saint-André a été l’accession à ce passage le bon sens fait comprendre qu’on l’a établi sur le fort, hors de la portée du ruisseau et de ses alluvions marécageuses.
On a eu d’ailleurs une preuve directe que le cours d’eau tournait à gauche alors qu’on a creusé les fondations des halles et qu’on a descendu 2 mètres pour trouver le terrain solide. C’est aussi dans la partie de la Sèvre, en aval du moulin actuel du château, qu’était le premier port ou pour mieux s’exprimer le point d’attache des bateaux de nos ancêtres. Nous ne croyons point beaucoup à la tradition populaire qui veut que les vaisseaux aient, dans un temps, gagné par les fossés la place de la Brèche. Le fameux navire des contes de fées qui marchait sur mer et sur terre n’était pas encore passé dans la pratique, il paraît aussi difficile de faire monter une barque des Ponts-Main à la place Saint-Jean que de lui faire escalader les rochers du jardin public. Mais si cette légende a le moindre fond de vérité, elle s’applique à ce moment de notre histoire. Rien n’empêchait à la rigueur les bateaux plats de remonter l’hiver le cours de Bouillonnouse, même de s’y mettre à l’abri, lors des crues de la Sèvre plus fréquentes et plus torrentielles, puisqu’il n’y avait alors ni moulins ni chaussées de retenue pour modérer son cours.
Toutes ces choses ne présentent pas grandes difficultés en remontant jusqu’au VIe siècle de notre ère. Mais antérieurement on se trouve en présence du texte de la chronique de Maillezais qui dit que jusqu’à cette époque tous nos pays ont été recouverts par la mer. Le bas de la ville de Niort a-t-il été réellement sous la mer ? M. Fillon croyait que non ; II acceptait les dires du moine de Saint-Maixent, mais il les restreignait à l’estuaire formé plus bas par l’ile de Maillezais, séparant l’eau salée et l’eau douce entre l’île susdite et le marais d’Arsay par une barre limoneuse analogue à celles du golfe de Lyon si bien décrites par M. Lenthéric. M. Briquet au contraire, dans le Mémoire cité plus haut, mettait la rue des halles en eau profonde, limitant le rivage à la hauteur de la rue du Faisan et du Soleil. Les personnes qui se rangeraient encore du coté de cette opinion plus ancienne, ne feront pas mal de surveiller de près les constructions romaines de la rue des Ponts-Main. Comme elles sont datées par les monnaies, au 1er siècle de notre ère, elles seraient bien plus remarquables que les villes si renommées créées par les Romains dans la baie de Baïa. En effet sans communications avec la terre ferme, elles auraient été bâties au-dessous de six à sept mètres d’eau et seraient restées cinq cents ans recouvertes par l’eau de mer. C’est peut-être ce qui explique que nous trouvions tant d’huîtres au travers du ciment.
Plus tard Niort se forma. Notre ville reçut une enceinte continue de murailles et de fossés que Bouillonnouse servit alimenter en partie. Un château fut élevé tout près du port pour en garantir la sécurité (2). Établir les fondations d’un château était une tâche pénible dans ces terrains rendus partiellement marécageux par le cours d’eau dont nous avons parlé. On obvia à cet inconvénient en remblayant et en détournant le ruisseau. Ses eaux furent captées dans un canal qui fut le Merdusson et rejoignit évidemment les fossés du donjon reconstruit.
Ce canal recevait donc le trop-plein de la source de Bouillonnouse, ainsi nommée probablement à cause du bruit qu’elle fait en sortant de terre ou plutôt en revilant l’hiver, selon l’expression poitevine.
L’ancienneté du Merdusson est incontestable. Nous le trouvons cité au XIIIe siècle ainsi que l’Herberie dans le curieux document publié par M. Bardonnet sur l’état du domaine royal en Poitou (3), 1260. Vers la fin du XIVe siècle, Jean de Berry remania, refit peut-être le canal du Merdusson, lorsqu’il construisit les halles. Sous son gouvernement le bas de la ville de Niort se transforma complètement. Le frère de Charles V a été pour notre commune un bienfaiteur dont le nom doit toujours rester gravé dans nos souvenirs. Un hôtel de ville, un port, des halles et probablement la flèche de Notre-Dame sont autant de titres à notre éternelle reconnaissance !
Le Merdusson jusqu’à ce jour creusé à ciel découvert fut dévié vers la porte du Pont et devint souterrain dans presque tout son parcours. On laissa toutefois des ouvertures dans plusieurs endroits pour en faciliter le nettoyage. Cette précaution était bien utile, car sûrement les cochons de Saint-Antoine-de-la-Lande autorisés au parcours dans la ville n’étaient pas de fameux ouvriers, et nos concitoyens durent procéder fréquemment au curage de ce canal devenu un cloaque. La salubrité publique en souffrit.
M. Briquet donne le nom d’un charretier qui fut chargé, en 1490, de nettoyer le canal. Les travaux de curage durèrent cinquante jours.
Fait pour éviter l’inondation dans la ville basse, le Merdusson devint bientôt une cause d’insalubrité, surtout au moment où la peste ravagea notre contrée. Niort a vu plusieurs fois le terrible fléau décimer ses habitants. Dès le XIVe siècle nous trouvons la trace de son passage. Le XVe et le XVIe la voient aussi dans nos murs. Enfin au commencement du XVIIe siècle la peste fait les plus grands ravages parmi nos concitoyens.
Assurément le canal du Merdusson n’est pas étranger à la propagation de cette cruelle maladie.
A cette époque le Merdusson commençait au bout des halles, du côté du minage, devant l’hôtel des Trois Pigeons que possédait Joseph Boreil. Dans cet endroit un pont en recouvrait l’ouverture. Après avoir côtoyé les halles le canal entrait dans la rue de l’Herberie, passait devant l’hôtel du Cheval Blanc tenu par Jehan Leroy et devant lequel se trouvait encore un pont ; puis traversant la rue Saint-Jean, il pénétrait dans la rue qui porta son nom. Au bout de la rue du Merdusson le canal passait sous la venelle qui faisait communiquer la rue avec les halles, à côté de la maison de Perrette Senné, veuve de Rolland Thibaut, échevin. Contournant l’extrémité des halles, du côté du château, et entrant, devant le placiste du château, sous la maison de Jehan Esserteau, il traversait la rue du puits Nallier puis longeant la maison de Daniel Couras, à laquelle pendait l’enseigne de la Pine d’Or, et passant dans les fondations de l’ancienne prison criminelle qui est une construction du XVe siècle, le Merdusson coulait parallèlement à la rue du pont et se jetait dans la Sèvre près de la porte du pont, à côté de la tour qui lui empruntait son nom.
Tel était le parcours de ce canal dont la portion voisine des halles se trouvait presque toujours obstruée par les détritus que jetaient les marchands établis dans cet édifice. Peu à peu l’eau de Bouillonnouse n’y arrivant plus qu’un ou deux mois d’hiver, le Merdusson fut négligé et se combla. Les Niortais furent de nouveau incommodés par de fréquentes inondations, d’autant plus que les fossés eux-mêmes devenant moins utiles s’atterrissaient aussi.
Augier de la Terraudière, en 1675, raconte dans la préface du Thrésor de Nyort que l’emplacement des halles est « tellement marécageux qu’aux grandes pluyes il y sourd de l’eau en quantité, toutes les caves des maisons en estant remplies, mesme l’église des Cordeliers et pour y remédier, il n’y a pas longtemps qu’on fut contraint de faire un canal dans ces halles pour y attirer l’eau et de hausser beaucoup l’église des Cordeliers. » Le Merdusson, plus ancien que les halles, passait en dehors. Ce second canal était dans l’édifice même. Était-il trop étroit ou mal entretenu ? Nous ne pouvons le dire. Mais il est certain qu’il fut insuffisant puisqu’on 1748, après de nouvelles pluies abondantes, les eaux s’accumulèrent devant les murailles de la ville et en menacèrent la solidité. On fit une large brèche pour laisser passer les eaux qui recouvraient les terrains devenus plus tard la place de la Brèche.
Aujourd’hui l’écoulement des eaux pluviales est une question d’actualité pour certains habitants de notre ville. Nous donnons ces renseignements historiques avec l’espoir qu’ils ne paraîtront pas superflus à ceux qui cherchent à réprimer les envahissements de Bouillonnouse.
Émile Breuillac
(1) Arrêté du 24 décembre 1825.
(2). Un château plus ancien fut brûlé eu 1104 et a été remplacé au XIIe siècle par le donjon actuel.
(3). Hommages d’Alphonse, comte de Poitiers, frère de Saint-Louis, par A. Bardonnet. Niort, Clouzot, 1873.
Source : Bulletins de la Société de statistique du département des Deux-Sèvres, n° 10-12, octobre-décembre 1882, page 143
Remarque : Breuillac dit : « On fit une large brèche pour laisser passer les eaux qui recouvraient les terrains devenus plus tard la place de la Brèche. ». Mais, si l’on lit le travail de M. Barelle sur « La Place de la Brèche à Niort et ses allées hautes depuis leur création en 1770 jusqu’à 1909 » :
Dans un article très documenté publié par M. Henri Proust dans le Bulletin de la Société de Statistique (janvier-mars 1887) sur la véritable origine du nom de place de la Brèche (2), l’auteur expose qu’on croyait généralement, à Niort, que ce nom venait d’une brèche qui fut ouverte dans les murs de la ville, en cet endroit, pour faire écouler les eaux qui, par suite des inondations extraordinaires survenues en 1747 et causées par une source qu’on nomme Bouillounouse, s’étaient accumulées en bas des remparts et inondaient jusqu’aux deux tiers les rez-de-chaussée du quartier du Port. Celle croyance n’était pas exacte. Lorsque le tarif d’octroi fut établi en 1718, les remparts tombaient en ruine en bien des endroits. il fallait les relever pour qu’ils pussent arrêter les fraudeurs ; aussi, le 23 mai de cetle année, le maire et les échevins procédèrent à une visite générale qui devait servir de base au devis des réparations.
Il résulte de leurs constatations qu’il y avait, à l’endroit en question une brèche qui était devenue un passage habituel. Elle n’était pas la seule, la visite des experts en fait foi, mais elle se trouvait en un lieu plus commode pour rentrée et la sortie de la ville. Cependant, elle fut murée, mais elle avait tellement sa raison d’être que trente ans plus lard elle fut rouverte officiellement et devint une porte charretière comme les trois autres grandes portes. Le terrain contigu fut dit « lieu de la Brèche ». Etc…
Source : Bulletin de la Société historique et scientifique des Deux-Sèvres, tome 6, 1er, 2e, 3e et 4e trimestres de 1931, page 66.
La Brèche sera objet d’un article à venir …
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Encore la crue de 1747 :
LES REVENUS ET LES DÉPENSES DE L’HÔTEL DE VILLE DE NIORT AVANT 1789 PAR HENRI PROUST
Page 275
En 1747, par exemple, après une inondation extraordinaire qui avait emporté les ponts de la ville, les dégradations faites au port avaient occasionné une dépense que le faible revenu de la coutume, même accumulé pendant bien des années, eût été impuissant à couvrir.
« La crue d’eau arrivée le 20 février », dit le procès-verbal de la visite faite par les maire et échevins, « a été si abondante et si grande que de mémoire d’homme on n’avait vu notre rivière si grosse, ni si haute, de façon qu’elle a inondé totalement le port de cette dite ville, au point qu’elle est montée et traversée la grande rue du dit port de plus de six à sept pieds de haut en dessus du pavé, qu’elle est allée se jeter et se joindre avec beaucoup de rapidité dans le bassin du quai, qu’elle est entrée dans toutes les boutiques et maisons du port à plus des deux tiers du rez-de-chaussée, qu’elle y a fait un dommage considérable dans les marchandises des marchands du dit port, surtout dans celles des sels qu’elle a entièrement emportés et fondus ; les marchands et habitants de ce faubourg ont été obligés de se retirer avec toute leur famille dans leur chambre haute, presque sans aucun vivre ni subsistance, et ce pendant cinq à six jours sans pouvoir sortir de leur maison, ni qu’il fût possible de leur porter aucun secours. »
« Cette inondation a été si violente qu’elle a renversé et emporté plusieurs moulins, chaussées et quantité de maisons du dit faubourg du port de cette ville. Elle a enfin fait tant de ravage qu’elle a occasionné des dégradations très considérables et très coûteuses qui sont à la charge de ce dit hôtel-de-ville, tant aux ponts, quai, havre, bassin et murs de cette dite ville desquelles il est nécessaire d’en faire ici le détail. »
Les experts nommés pour cette visite qui se faisait le onze mars estimèrent à 8,140 livres les dommages causés au havre et bassin (1). On remarquera qu’il n’est pas question de ceux qu’il pouvait y avoir, qu’il y avait certainement en aval de Niort au canal et aux écluses.
(1) … Nous dits experts sommes transportés sur le quai ou havre du port où nous avons trouvé deux brèches au dit quai renversées dans le bassin où arrivent et déchargent les bateaux pour le commerce, la première desquelles brèches est de la longueur de douze toises sur neuf pieds de large et de douze pieds de hauteur et la seconde est de sept toises de longueur sur quinze pieds de hauteur, avons aussi vu et examiné la première cale ou décharge de bateaux à l’entrée du bassin que nous avons trouvé totalement dépavée et les terres qui forment la pente de la dite cale emportées dans le bassin…. pour rétablir les dites deux brèches et la cale comme elles étaient ci-devant estimons la dépense à la somme de deux mille cent quarante livres,
…. Avons pareillement vu et examiné et fait attention à la dépense qu’il convient absolument faire pour le nettoiement du havre ou bassin qui est presque rempli et comblé par les débris des moulins, chaussées, maisons renversées et emportées, brèches, pavés et immondices des rues et de toute part entraînées par les dites eaux dans le dit bassin, de manière qu’il est impossible que les bateaux puissent arriver jusqu’à la cale de décharge, laquelle dépense nous estimons la somme de six mille livres.
Source : Mémoires de la Société de statistique du département des Deux-Sèvres, 3e série, tome 5, 1888
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Bibliographie :
1747 – 1860 – Les inondations de la Charente, de la Tardoire, de la Boutonne et du Né
http://www.histoirepassion.eu/spip.php?article687
Inondations en France en 1935 et 1936 – Maurice Pardé - Annales de Géographie – 1937
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1937_num_46_260_12162
Périodicité des grandes inondations et crues exceptionnelles – Maurice Pardé – Revue de géographie alpine – 1928
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_1928_num_16_2_4457
Les inondations désastreuses de mars 1930 – Maurice Pardé – Annales de Géographie 1930
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1930_num_39_219_10084
Maîtrise de l’eau et société en Marais Poitevin (vers 1150-1283) – Jean-Luc Sarrazin – Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest – 1985
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0399-0826_1985_num_92_4_3196
L’évolution urbaine de Niort – J. Miquet - Norois Année – 1967
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/noroi_0029-182x_1967_num_55_1_1566
Les inondations de février 1904 à Nantes (on parle aussi de celle de 1936) :
http://www.archives.nantes.fr/pages/RESSOURCES/actualites/inondations_1904.htm
1711 – Extrait du livre nord de Cérémonial concernant la grande inondation de la Loire en février et mars 1711 : Au mois de février et mars 1711, il y a eu une si grande inondation de la rivière de Loire que cinq arches du pont de Pirmil ont été renversées ; la pluspart des ponts de la Madeleine renversés, aussi bien que ceux de la Belle-Croix, Pont-Rousseau, le bas de la Motte Saint-Pierre, etc… Les eaux ont été si grandes qu’on alloit en batteau depuis la rue du Port-Maillard, jusqu’à la porte Saint-Nicolas, passant par le Bouffay… sans cependant qu’il soit pery que cinq à six personnes ; … il n’y a eu aussy que cinq à six maisons renversées sur les ponts ; mais la plus grande partie des maisons et héritages des bords de la Loire ont été ruinées et renversées, ce qui n’a pas été retably et ne le sera de longtemps par la grande misère et la grande quantité de sables que les grandes eaux ont laissées… » —
http://www.archives.nantes.fr/pages/HISTORIQUE/IMAGES/fonds/grandes/EE236_5.htm
Des pluies persistantes du 28 décembre 1935 au 11 janvier 1936 provoquent d’importantes inondations dans l’ouest de la France.
Les inondations de janvier 1936 resteront gravées dans les mémoires.
http://pluiesextremes.meteo.fr/1936-01-10/inondations-dans-l-ouest-de-la-france.html
Les inondations en France depuis le VIe siècle jusqu’à nos jours – Maurice Champion (1824-1878) – Il y a 6 volumes qui sont sur le net.
L’œuvre de Maurice Champion – Denis Coeur
http://www.hydrologie.org/BIB/champion/oeuvre/CHAMP.pdf
L’évolution du risque d’inondation dans la vallée de l’Hers Mort (à l’Est de Toulouse) :
Mémoire de Nicolas Favre, maîtrise de géographie, juin 2004, Université Toulouse, le Mirail.
http://www.aquadoc.fr/IMG/pdf/01_memoire_inondation_Hers_Favre_introduction_et_sommaire.pdf
Partie 1 :
La vallée de l’Hers Mort, une région en mutation face au risque d’inondation
http://www.aquadoc.fr/IMG/pdf/02_memoire_inondation_Hers_Favre_partie_01.pdf
Partie 2 :
Le risque d’inondation du XVIe siècle à nos jours
http://www.aquadoc.fr/IMG/pdf/03_memoire_inondation_Hers_Favre_partie_02.pdf
Partie 3 :
Le SIG : un outil d’aide à la décision
http://www.aquadoc.fr/IMG/pdf/04_memoire_inondation_Hers_Favre_partie_03_A_debut.pdf