Léo Desaivre par Emile Breuillac – 1916

Messieurs,

Tous vous savez le triste événement que j’ai mission d’annoncer à cette séance. Le plus laborieux, j’ajoute le plus érudit et celui qui produisait le plus parmi nous est mort. Les obsèques de M. Léo Desaivre ont eu lieu le mercredi 31 mai.
Aussi modeste que réellement savant, notre collègue désira de la simplicité jusqu’à la fin. Il demanda qu’aucun discours ne fût prononcé sur sa tombe. Je l’ai regretté comme président de notre Société. En qualité d’ami, j’éprouvai une privation. Tant de choses étaient à dire pour rappeler à nous tous qui le fréquentions et qui souvent puisions à son érudition, aussi pour apprendre aux autres que l’histoire poitevine perdait un travailleur fervent et consciencieux.
Est-il besoin, après les articles de la presse régionale, de redire que le docteur Desaivre appartenait à une vieille famille du Poitou ? Son grand-père avait été avocat au parlement. Son père, notaire à Champdeniers, y exerçait cette honorable profession avec le tact et la dignité qui lui créèrent une notoriété respectée dans le canton tout entier. Conseiller d’arrondissement, il était l’ami et le confident de ses électeurs.
Lorsque Léo Desaivre eut terminé ses études dans cet ancien collège de Niort, que plusieurs d’entre nous entrevoient dans leurs souvenirs d’enfance, avec ses vieux bâtiments à l’aspect tassé par les années, sa cour d’entrée toujours quelque peu herbeuse où résonnait la vieille cloche au son fatigué d’avoir tant sonné pour les jeunes génération. Léo Desaivre, dis-je, se rendit faire ses études de médecine à Paris. C’est à cette époque que visitant son compatriote Tribert, il eut l’occasion de connaître Daniel Stern (la comtesse d’Agoult).
Installé docteur-médecin à Champdeniers, il s’y fit promptement une clientèle qu’entretenaient sa science et de nombreuses sympathies. Un brave cœur généreux, toujours porté vers des services à rendre.
Durant la guerre de 1870-71, notre collègue accomplit son devoir de bon français comme capitaine de mobiles. Au retour, les habitants de Champdeniers lui confièrent la mairie. Quelques années plus tard, il vint siéger au Conseil d’arrondissement, puis au Conseil Général où il resta représentant de son canton jusqu’en 1895.
Mais depuis assez longtemps déjà, après son mariage avec Melle Savin-Larclause, issue elle aussi d’une ancienne famille qui avait, à Fontenay-le-Comte trouvé dans le notariat une réputation exemplaire, Léo Desaivre était venu habiter Niort et Saint-Maxire. Une surdité précoce l’avait contraint d’abandonner l’exercice de la médecine. Les recherches historiques, les études des traditions devinrent désormais la principale occupation de sa vie.Toujours en quête des faits et gestes du passé il publia beaucoup.
Sa parenté avec Alfred Richard, l’ancien savant archiviste de la Vienne, et son amitié avec Abel Bardonnet lui aidèrent à connaître les archives publiques ou particulières, ainsi qu’à s’initier rapidement à l’archéologie.
A la Société de statistique, sciences, lettres et arts des Deux-Sèvres, dont Léo Desaivre fut successivement secrétaire, vice-président et président ; à la Société des antiquaires de l’Ouest, à notre Société historique et scientifique on recherchait ses travaux avec empressement tant on les savait marqués au bon coin d’une solide érudition. Certes, je ne veux pas ici vous en faire une nomenclature. Ce soin reviendra à l’un de nos collègues qui a acquis dans ce genre une compétence très appréciée. Permettez-moi, cependant, de vous rappeler l’histoire de Saint-Maxire, ce joli petit village qu’arrose la Sèvre.
Notre ami venait s’y reposer durant les mois d’été. La rivière bordait sa propriété, tout contre un moulin qui chantait sous l’impulsion d’une eau claire, fraiche aussi sous de hauts peupliers. – L’histoire de Champdeniers, avec sa vieille église romane dont les illustrations dues au crayon de Sadoux ajoutaient encore à l’intérêt historique du volume. – Enfin l’histoire de Mélusine que mit en vers, au temps jadis, le poète Couldrette. Sous sa plume toute imprégnée des traditions poitevines. Léo Desaivre a fait revire cette femme merveilleuse, un peu incompréhensible, en raison de son origine féérique, mais célèbre par les grandes actions de la famille de Lusignan dont elle est l’illustration.
Et les travaux se succédèrent sur des sujets toujours attrayants. Jusqu’à ces derniers jours, je vous apportais à nos séances ceux que son grand âge ne permettait plus de communiquer lui-même. Nos publications les donneront prochainement.
Notre collègue est mort, Messieurs, je ne le contredis pas, sous les atteintes d’une maladie occasionnée par la vieillesse. Laissez-moi ajouter – j’en eu à plusieurs reprises la confidence, – qu’il souffrait beaucoup des terribles événements que notre douce France doit surmonter. « Combien est-ce lourd, me disait-il un jour, de voir tant de familles frappées cruellement. A mon âge, que d’émotions qui usent ! ». C’est que le docteur Desaivre était profondément bon. Toutes ses belles qualités qu’il avait prodiguées aux autres, durant sa longue existence, se réunissaient en un patriotique amour de son pays, dont il avait si bien étudié l’histoire.

Émile BREUILLAC

Bulletin de la Société historique et scientifique des Deux-Sèvres  – 1916 (1er et 2e trimestre) – Page 211.

Léo Desaivre a pour ancêtres :

Desaivre Léo Antonin Evariste, (1837 Champdeniers – 1916), docteur en médecine, historien, membre de diverses sociétés savantes.

Desaivre Evariste, (1808-1869), notaire, époux de Albert Marie Louise

Desaivre René, (décédé 1809 à Saint Maxire), époux de Richard Esther

Desaivre Jean François, (1747-1821), avocat, époux de Bega Aimée

Desaivre François, (1721-1787, Saint Maixent de Beugné), seigneur des Fosses d’Espasmes, du fief Boisneuf et de Chantegroux, garde du corps de Louis XV, époux de Draud Marie Charlotte

Desaivre Isaac, (1690-1747), époux de Chauvin Françoise

Desaivre / Desayvre Guy, seigneur de la Marjonnière,  époux de Bruchaire Marie (x ca 1686)

Une étude des familles Desayvre / Desaivre sur le site :
http://geneah.e-monsite.com/medias/files/de-sayvres-2.pdf

Le site du collège Léo Desaivre de Champdeniers Saint-Denis, avec une biographie très complète de Léo Desaivre :
http://etab.ac-poitiers.fr/coll-champdeniers/IMG/pdf/DESAIVRE_Leo_site_du_college-2.pdf

L’histoire de Saint-Maxire :
http://www.histo.com/quotidienne/quotidienne2/28072004.pdf

L’histoire du château de Germond à partir des travaux de Léo Desaivre :     « le château des Mothes de Germond », travail que l’on trouve dans « Bulletin de la Société de statistique des Deux-Sèvres, 1888-1890. »
http://www.cc-parthenay.fr/parthenay/creparth/caliber-sainque/biblio/chateau-germond.pdf

Remarque : sur le site Amazone.fr, à la date d’aujourd’hui on trouve 83 ouvrages avec la recherche Desaivre et 44 ouvrages sur le site livre-rare-book.

Dans la revue « l’Intermédiaire des curieux », Léo Desaivre signait sous le pseudonyme de Léda. La revue fait paraître un avis d’obsèque en juillet 1916

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