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Histoire de Jean MIGAULT, instituteur protestant de Mougon, réfugié en Hollande

Extraits de "100 lectures d'histoire locale se rapportant au département des Deux Sèvres", G. Picard, 1939



Jean MIGAULT était maître d’école et, de plus, notaire, avant que cette charge ne fût interdite aux réformés. Depuis six mois, Jean MIGAULT était venu de MOULAY , son village, s’établir à MOUGON, quand les dragons du Roi y arrivèrent. C’était le 22 août 1681.

« Les cavaliers visitèrent tout, écrit Jean MIGAULT, qui nous a laissé le récit de ce qui lui est arrivé, et prirent pour eux le linge dont ils avaient besoin. Le reste, avec nos lits, vaisselles, poisleries et habits, ils le portèrent la plus grande partie chez le nommé LA FONTAINE-BANLIER, nouveau papiste, qui acheta le tout pour du vin, qu’ils burent en rompant et brisant nos meubles de bois.

« Nos coffres, armoires et sept grands châlits ne furent pas mieux traitez. Le curé, plein de rage, pour m’empêcher de retourner une seconde fois dans ce logis, obligea ces cavaliers de rompre les portes et les « fenêtres d’icelui », et de fait, dans cette même nuit, après avoir achevé de briser tous nos meubles, ils mirent en pièces toutes les portes de fenêtres de cette maison, au nombre de trente-cinq » .


Quand à la malheureuse femme de Jean MIGAULT, voici ce qui lui arriva :

« Ils la mirent dans un coin de la cheminée, et ils apportèrent quantité de bois et allumèrent un feu qui se faisait sentir dès la moitié de la chambre, quoiqu’elle fût fort grande. Ils jettèrent aussi dans ce feu quelques pièces de meubles de bois, et croyant gagner quelque chose sur elle par leurs menaces, juroient et blasphèmoirent le nom de Dieu à leur ordinaire, disant qu’ils la feraient brûler si elle ne voulait se convertir. Et quoique ses bourreaux la gardoient tour à tour, pour la faire d’autant plus souffrir, cependant, ils ne gagnèrent rien sur son esprit. Dieu la soutint par sa bonté. Elle fut pourtant si affaiblie par cette grande chaleur, joint le peu de forces qu’elle avait auparavant, qu’elle resta presque sans aucun sentiment, ni connaissance.
« Et quoique ces dames voisines s’emploiassent pour la faire s’éloigner du feu, elles n’eurent pourtant aucun pouvoir sur l’esprit de ces misérables et, peut-être y eût-elle expiré, si Dieu, par bonté et miséricorde, ne lui envoyé du secours.»

La femme de Jean MIGAULT réussit, en effet, à se cacher dans un grenier, sous du linge. Les dragons après l’avoir cherchée, se mirent à table, et passèrent la nuit à boire.

Au mois d’octobre, les dragons revinrent à MOUGON. Et MIGAULT qui y était revenu de nouveau, voulut s’enfuir. La pauvre famille se réfugia à MAUZÉ. Là, la mort vint bientôt mettre un terme aux maux d’Elisabeth FOURESTIER, la femme de Jean MIGAULT.
MAUZÉ servait aux protestants de lieu de refuge. Le culte protestant s’y maintint jusqu’à la révolution, par égards pour une famille noble du voisinage, les DESMIERS D’OLBREUSE, alliés aux souverains de BRUNSWICK-ZELL-LUNEBOURG et de BRUNSWICK-HANOVRE (cette famille est celle des souverains actuels d’Angleterre.) MIGAULT avait rouvert son école à MAUZÉ .

Mais les dragons se rapprochant de MAUZÉ, MIGAULT dut renvoyer ses pensionnaires, éloigner ses propres enfants et s’enfuir lui même. Pendant deux mois, il erra dans le POITOU, la SAINTONGE et l’AUNIS, se cachant le jour, ne sortant que la nuit, et ne séjournant jamais plus de quarante-huit heures dans le même endroit.
JEAN MIGAULT se réfugia ainsi à OLBREUSE, paroisse d’USSAU. Mais il dut bientôt encore s’enfuir du château et cacher de nouveau sa famille, ce qui devenait très difficile. Il se réfugia dans un ancien souterrain refuge. L’ouverture n’en était guère plus grande que celle d’un puits, mais il y avait plusieurs salles dont chacune était pourvue d’un banc taillé dans le roc.
Là, Jean MIGAULT vécut avec ses deux fille aînées. Chaque nuit le vieux domestique de Madame Desmier venait leur apporter des vivres. Mais on n’avait pu rouvrir les bouches d’aération que les constructeurs de ce refuge avaient pris soin de pratiquer. La santé des réfugiés s’altéra tant qu’il leur fallut sortir du souterrain au bout de trois semaines.
Jean MIGAULT finit par gagner LA ROCHELLE et quitter la FRANCE. Ce ne fut pas sans nouvelles tribulations. Il arriva en HOLLANDE. Sa fille Jeanneton, qu’il avait laissée derrière lui, finit par le rejoindre. Ne sachant où trouver son père à son arrivée, elle s’était rendue à l’église française avec l’espoir d’en avoir des nouvelles. Et ce fut son père lui-même qu’elle y rencontra.

Merci à M. Guillon pour la saisie du texte



Commentaires - Mise à jour 03/07/2000